Tout est parti d'un article de Médiapart : il y a un peu plus de deux semaines, le site d'information assurait que Bernard Tapie était sur le point "d'acheter pour 47 millions d'euros l'une des plus belles villas de Saint-Tropez". Il ajoutait alors que "cette acquisition fait suite à l'achat en 2009, pour 40 millions d'euros, de l'un des plus beaux yachts du monde". Et l'auteur de cet article, titré "La vie de nabab de Bernard Tapie", de souligner : "Voilà où passent les 403 millions d'euros qui ont été pris, sur ordre de Nicolas Sarkozy, dans la poche des contribuables à l'issue de l'arbitrage Adidas-Crédit lyonnais".
Invité mardi matin à l'antenne d'Europe 1, Bernard Tapie n'a pu éviter les questions sur cette fameuse villa. Questions auxquelles il a résolument refusé de répondre. Il y a "deux réponses à ça", a-t-il répliqué au journaliste qui l'interrogeait : "La première, c'est 'je vous emmerde' (...). Je te demande pas où t'habites, si tu es propriétaire d'un appartement, parce que moi, je suis pas curieux". Seconde réponse : Bernard Tapie affirme n'avoir qu'un seul logement, son hôtel particulier parisien de la rue des Saints-Pères.
L'arbitrage Adidas-Crédit lyonnais revient à l'ordre du jour
Derrière cette question des possibles acquisitions immobilières de Bernard Tapie, c'est bel et bien celle de l'arbitrage Adidas-Crédit lyonnais qui se profile. Dans ce dossier, le procureur de la République de Paris a ouvert mardi dernier une information judiciaire dans le volet non ministériel de l'affaire. Cette information a été ouverte contre X pour "usage abusif des pouvoirs sociaux et recel de ce délit au préjudice du consortium de réalisation" - le CDR, organisme chargé de gérer le passif de la banque. En juin 2011, le parquet de Paris avait déjà ouvert une enquête préliminaire pour "abus de biens sociaux", visant implicitement Jean-François Rocchi, le président du CDR, qui avait mis en oeuvre l'arbitrage favorable à Bernard Tapie dans cette affaire du Crédit Lyonnais. L'information vise également Bernard Scemama, ancien président de l'Etablissement public de financement et de réalisation (EPFR), l'entité contrôlant le CDR. Ces deux hauts fonctionnaires avaient appliqué la décision de la ministre de l'Economie de recourir en 2007 à un arbitrage pour solder l'affaire Tapie/Crédit Lyonnais.
La décision de solder par un arbitrage privé le litige judiciaire concernant la revente en 1993 d'Adidas, contrôlé par Bernard Tapie, par le Crédit lyonnais, alors banque publique, avait été prise alors même que l'Etat, en charge du passif du Lyonnais via des entités publiques, avait gagné en 2006 devant la Cour de cassation, plus haute juridiction française, et se dirigeait donc vers une victoire définitive. Au lieu de cela, les arbitres - dont un au moins semble avoir été lié à Bernard Tapie - lui ont accordé en 2008 285 millions d'euros. Alors ministre de l'Economie, Christine Lagarde, malgré l'avis de ses services, n'avait pas contesté ce résultat.
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