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Maisons de stars ou maisons stars ? Saint-Tropez ou, plus haut sur la Côte, le cap d’Antibes, Saint-Jean-Cap-Ferrat ne cultivent pas la différence. Autre point commun : il est à peu près impossible de les voir. En bateau parfois, la vague nous fait voguer vers elles et on aperçoit bien quelques points, mais les propriétaires qui peuvent s’enorgueillir d’un bout de plage protègent farouchement, bien entendu, son accès.
Le golfe de Saint-Tropez s’orne de splendeurs , cachées le plus souvent, dominant la mer, les pins dessinant la plus belle des chorégraphies au-dessus de l’eau. Il est loin le temps où, en parcourant la route des Salins, on citait, comme une litanie, « ici, la maison de Jean-Pierre Beltoise, le champion de formule 1, et là celle de Herbert von Karajan, le chef d’orchestre, et puis Gunter Sachs et son domaine vers la Moutte, plus loin il y a la Madrague de BB… » Toutes ces maisons ont été vendues, hormis celle de BB, qui s’en est fait construire une autre, mais qui continue à se rendre dans la première. Reste aujourd’hui Jean-Yves, chauffeur des bus de Saint-Tropez, sympathique pilier tropézien qui connaît son monde par coeur et s’astreint à en dévoiler les trésors : « Vous savez bien sûr qu’ici, près de la route de Tahiti, Paul Signac, oui, le peintre, avait sa maison.Elle est décorée de mosaïques, c’est mon grand-père qui a fait les travaux. Celle de Colette aux Salins, la Treille muscate ? Elle est restée dans la famille. » Il recueille en général plus d’admiration pour son enthousiasme à faire connaître ses vraies stars que d’intérêt.
L’espace ne se compte plus, l’argent non plus. Non pas que ce soit vulgaire, on n’en est plus là après les années fric, frime et sexe, tout simplement les limites n’existent plus. Une des ventes les plus spectaculaires eut lieu en 2004 : 43 millions d’euros pour une propriété de 2 000 mètres carrés au sol entourée d’un terrain de10 hectares. La villa de Mohamed al-Fayed a été vendue autour de 70 millions d’euros. Pas grave. Les (très) grosses fortunes qui rêvent d’un (très) grand pied-à-terre à Saint-Tropez suivent la voie de leurs prédécesseurs et se dirigent vers les plages, Pampelonne, l’Escalet (proche de Ramatuelle), le Capon, choisissent les Parcs de Saint-Tropez, la Moutte, les Canebiers.
Rien de plus authentique que d’acheter une maison dans le village. « Formidable, on va au marché place des Lices à pied, pas d’embouteillages, et pour la plage, on va où on veut ! » Même Ivana Trump a acquis un studio pas loin de la citadelle… son yacht amarré juste en bas. Donc, si l’on vous annonce « 200 000 euros pour une maison », c’est de location qu’il s’agit, et pour le mois. En été bien sûr. Pour 30 000 ou 40 000 euros, on peut cependant trouver son bonheur. A l’achat, une villa avec vue sur mer vaut entre 10 et 40 millions d’euros. Les « petits budgets » se contenteront, pour 2 millions d’euros, du bleu d’une piscine. « Dans deux ans, on ira jusqu’à 70 millions d’euros , prédisent les agents immobiliers de Saint Tropez. Les millions de francs d’il y a dix ans sont devenus des millions d’euros. »
Saint-Tropez, c’est 5 600 habitants l’hiver, 5 millions de visiteurs par an, dont 2 millions en juillet et août. C’est 1 800 chambres d’hôtel et 3 800 résidences secondaires verrouillées. Les stars et les VIP des affaires se cachent des hordes touristiques (150 000 personnes par jour) dans les 80 % du cap de Saint-Tropez privés et non accessibles.
Par exemple, les Parcs de Saint-Tropez, un domaine privé créé il y a cinquante ans, gère 200 maisons réparties sur 110 hectares. Grilles, codes, service de sécurité et 400 personnes pour l’entretien toute l’année assurent le confort de priviégiés qui bénéficient d’une des plus belles vues au monde : la baie de Saint-Tropez. Dans le même coin, près de la plage des Salins, le producteur Stéphane Courbit (« Loft Story », « Les enfants de la télé »…) a acheté en 2005 à une famille de viticulteurs un terrain de 10 hectares : il y a fait bâtir une petite chose qui aurait été évaluée à 6 millions d’euros.
Quand dans le village, on dit : « Cécilia était là hier, vous savez où elle est installée ? » Ne répondez pas « au fort de Brégançon », comme un ignorant, faites « hum, hum », l’air entendu. On saura que vous savez : elle loge chez Vincent Bolloré. D’accord, mais où ? La rumeur attribue au président du groupe Bolloré… dix maisons dans les environs de Saint-Tropez. La rumeur… On connaît son domaine la Bastide blanche, 35 hectares de vignobles entre les caps Taillat et Lardier, et celui de la Croix. Après tout, sa résidence préférée est peut-être son yacht…
En attendant, sachez que rien ne bouge à Saint-Tropez : les codes sont les mêmes. Café chez Sénéquier relooké par le jeune designer Noé Duchaufour-Lawrence, déjeuner les pieds dans l’eau au restaurant de la plage des Salins et les sandales de l’atelier Rondini (Carla Bruni les adore), rue Clemenceau, la rue qui mène du port à la place des Lices.
Tony Murray, Franco-Britannique qui a fait fortune dans l’extincteur (numéro un mondial), a débuté comme pompiste à la fin de la guerre. A fleur de mer, sa villa (4 grosses maisons réunies en une seule) dans la résidence des Parcs de Saint-Tropez est protégée par des molosses et des Digicode. Elle est dotée d’un héliport que le maître des lieux, sympa, prête à tout le monde en cas d’urgence. En 2005 l’estimation de ce palais s’élevait à 100 millions d’euros. Chaque été, Tony invite un millier de personnes, du Tropézien de souche à Elton John en passant par Naomi Campbell, à une grande fête non sponsorisée qui lui coûte plusieurs centaines de milliers d’euros.
Par Brigitte Hernandez (avec Jo Lécrivain)
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