Saint-Tropez ... For Ever

En 2012, la ferme a reçu la médaille de bronze rosé 2011 à la Foire internationale des Grands vins de France à Mâcon. Photo vignette (en haut à gauche) : les deux œnologues Laurence et Patrick.

Une séance de dégustation avait lieu il y a peu à la ferme des Lices. L’occasion de revenir sur l’incroyable résurrection de ce domaine avec son instigatrice, Laurence Berlemont

On pourrait presque en faire un conte sauf que l'histoire est bien réelle. Tout commence il y a une vingtaine d'années, lorsque Laurence Berlemont, jeune œnologue, associée dans un cabinet de conseil, est contactée par Nina Michaelis, une Anglaise à la recherche d'une propriété à acheter en Provence. Les deux femmes se mettent au travail et multiplient les visites... En vain. Aucun terrain ne séduit l'intéressée et le projet tombe peu à peu aux oubliettes.

Quelques années plus tard, en 2002, Nina Michaelis rappelle l'œnologue pour lui annoncer qu'elle vient d'acquérir un petit vignoble à Saint-Tropez. « Je n'ai pas le temps de m'en occuper, je n'y connais rien et les plants sont en très mauvais état. Je te les confie en fermage », lui propose-t-elle. Un pari « un peu fou » que Laurence accepte de relever. Sur deux hectares dominant le chemin des Treilles de la Moutte, l'œnologue arrache, replante et redonne vie au vignoble.

Les autres propriétaires intéressés

Les voisins, intrigués, observent d'un œil curieux ce grand chamboulement. Leurs parcelles sont parfois mal entretenues, voire totalement abandonnées, et la récolte de raisin envoyée à la cave coopérative. « C'était frustrant, ils ne profitaient même pas de leur propre cuvée »,raconte l'œnologue. Quelques-unes en viennent à lui demander de l'aide. Laurence se lance alors un défi : convaincre tous les propriétaires de lui confier leurs terres. « Mon entourage me riait au nez quand j'évoquais ce projet. Il me disait que je n'arriverais jamais à recréer le domaine avec l'accord de tous », se souvient-elle. Car il y a une cinquantaine d'années, le lieu était un joli vignoble appartenant à un certain M. Angelvin avant qu'un projet immobilier ne balaye les plantations découpant le terrain en huit parcelles avec maisons et vignes. Nina sera la dernière acheteuse.

Naissance de la ferme des Lices

Entre 2002 à 2011, six propriétaires sur huit la rejoignent. La « ferme des Lices » voit le jour. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on y parle toutes les langues... Anglais, Hollandais, Suisse, Belge, Français et Italien, les acquéreurs sont chacun de nationalité différente. Ce qui n'était qu'un jeu devient une entreprise. Le vignoble s'étend désormais sur sept hectares. Le vin rouge, blanc et rosé AOC (appellation d'origine contrôlée) est même fabriqué sur la ferme : « Nina a acheté une cave jouxtant son domaine pour que je le fabrique sur place », raconte Laurence. Associée à Patrick Deveaux, autre œnologue, ils recrutent Agnès à la vente et Alexandre pour s'occuper des vignes. Les récompenses pleuvent. En 2012, la ferme reçoit la Médaille de bronze rosé 2011 à la Foire internationale des Grands vins de France à Mâcon. Une activité devenue une passion pour Laurence : « Je ne compte pas mes heures à la ferme. Bien qu'aujourd'hui je m'occupe de 50 propriétés en même temps dans le Var et les Bouches-du-Rhône. Ce que j'aime, c'est avoir carte blanche », explique l'œnologue. À part Nina, qui, depuis sa maison, « passe la tête pendant les vendanges », chaque propriétaire vaque à ses occupations et ne s'intéresse guère à la fabrication du précieux cépage. Ce qui compte, c'est le résultat. À ce titre, Laurence remet à chacun 120 bouteilles par hectare de la nouvelle cuvée... en guise de loyer. Chez les six propriétaires de la ferme des Lices, la dégustation dure toute l'année, en attendant le prochain millésime.

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